top of page

FIFIB Jour 5 & 6 : Des preuves d'amour au mariage pour tous, entre mère et fille, pour des enfants et pour son pays.

  • Tom Belarbi
  • 14 oct.
  • 7 min de lecture
Des Preuves d'Amour d'alice douard

Des Preuves d'Amour d'Alice Douard


La nostalgie s’installe déjà au centre-ville bordelais et aux abords de la Cour Mably, les festivaliers sont fébriles, déjà tristes de quitter cette grande fête cinématographique, tout en commençant à sentir les effets de la fatigue au long terme.


L’avant-dernier jour du festival aura commencé avec un des grands événements de cette 14e édition : l’avant-première événement de Des Preuves d’Amour d’Alice Douard, cinéaste bordelaise (et ayant tourné une partie de son film sur place) ayant fait sensation à la dernière semaine de la critique avec son premier long-métrage.


Fable romantique, doucement intime et copieusement burlesque, la réalisatrice traite des débuts de la loi du mariage pour tous au service d’une quête d’un couple (Ella Rumpf et Monia Chokri) en passe d’obtenir leur premier enfant mais devant légaliser leur statut parental.


Une prémisse servant vite de prétexte aux rencontres et retrouvailles entre ces deux femmes et leurs entourage amical ou parental, servit par un rythme décapant, jamais survitaminé, mais parvenant à établir une constante fébrilité dans son écriture, dépeignant le quotidien de ce couple traité avec humour et dignité.


Des Preuves d'Amour avec Ella Rumpf et Monia Chokri

Des Preuves d'Amour avec Ella Rumpf et Monia Chokri


Des Preuves d’Amour est porté par la tendresse infinie de sa cinéaste pour ses personnages, se servant de son expérience passée pour entretenir une authenticité folle dans les échanges et situations, desquelles l’intimité et normalité du quotidien fait souvent face à un humour absurde très communicatif. L’alchimie du casting est phénoménale, sans laisser en reste des personnages secondaires tous merveilleusement caractérisés et développés, quelque soient leur cadence ou nombre d’apparitions, offrant notamment à Noémie Lvosky un rôle d’une candeur et joliesse rare (retrouvant son timing comique ravageur).


Bien qu’Alice Douard tombe à certains moments dans des dialogues au didactisme un peu lourd, son premier film reste une superbe promesse pour sa future carrière, et surtout une comédie romantique populaire. Tout en traitant avec acuité un sujet qui n’en n’est jamais un, celui d’un couple homosexuel traité comme n’importe quel autre, plus tant par désir d’inclusivité que de réalisme ; tout en offrant enfin au public « un film queer joyeux ».


Sortie le 19 Novembre


BOUCHRA FILM D'ANIMATION EN 3D


Après cette très jolie surprise, passage par la compétition officielle avec un long-métrage étonnement très attendu, car si le nom de Meriem Bennani et Orian Barki ne vous dit peut-être rien, vous avez, après le confinement, peut-être vu une ou plusieurs vidéos de la série « 2 Lizards », diffusée sur instagram, filmant le quotidien de deux lézards humanoïdes coincés à Brooklyn pendant la pandémie.


2 lizzards Meriem Bennani et Orian Barki

2 lizzards Meriem Bennani et Orian Barki


Ici, on garde l’anthropomorphisme animalier et on pousse d’un cran l’utilisation du logiciel de 3D Blender (qui a largement fait ses preuves avec l’oscarisé Flow) dans un mélange de réalité documentaire et de fiction stylisée pour mettre en scène la vie de Bouchra, coyote marocaine expatriée à New York, conversant avec sa mère, restée à Casablanca, tandis qu’elle vit son homosexualité et débute un coming-out auprès de ses proches ; qui pourraient bien impacter certains secrets et refoulement familiaux.


Il sera bon de préciser que pour cette séance, le film a commencé normalement, à l’heure prévue et après une jolie présentation de la part d’une des programmatrices.

Puis, passé même pas 5 minutes plutôt intrigantes, le film crash.

Ou plutôt c’est le néon permettant d’illuminer le projecteur qui a rendu l’âme, laissant dérouler le son quelques instants avant qu’un spectateur se décide finalement à aller avertir le cinéma.

On aura attendu après ça, et des excuses d’un des patrons du cinéma (avec un texte et un embarras équivalant à celui qu’on sortait au CPE) quasiment une heure, ce qui aura à fors-suri anéanti mes chances d’assister à l’ultime film en compétition, dommage.


A noter que le jury était présent à la séance, et a vécu ce magnifique incident dont seul la salle 16 de l’UGC Gambetta a le secret, ce qui ne semble pas les avoir tant influé sur leur palmarès, mais on verra ça plus tard…


Pour ce qui est du film, disons que le projet est aussi dense, curieux que fascinant. Il est rare d’avoir des projets plus ou moins documentaires entièrement animés (comme avec l’excellentissime Flee), mais ici, le vernis formel sert bien plus à créer un univers fort, tout en iconisant d’autant plus certains moment du quotidien, en les recréant, les fantasmant, les stylisant ou autre.


Même si les travaux de mise en scène, ou de pure narration, sont parfois un peu délicats à suivre, le projet reste follement singulier et émouvant, que ce soit dans son humour pince-sans-rire ou son introspection très intime, fait notamment (on l’imagine) de réelles conversations téléphoniques.


La preuve qu’un sujet semblant très/trop ressassé est au contraire une potentielle source d’inventivité hors normes, et que ce soit sur le plan visuel, sonore et musical, clairement Bouchra s’impose comme un des essais les plus uniques en son genre tout en restant particulièrement abouti dans son animation. A mi-chemin entre le bricolage introspectif et queer de The People’s Joker et l’autobiographie à la Flee ou Persepolis, une petite pépite qui devrait rapidement trouver un distributeur.


Bouchra de Meriem Bennani et Orian Barki

Bouchra de Meriem Bennani et Orian Barki


LE NOUVEAU NATHAN AMBROSINI


Fin de journée avec une séance encore particulièrement attendue, puisqu’il s’agit du 3e long-métrage produit de Nathan Ambrosioni.

On précise « produit » car sinon il faudrait aussi compter la ribambelle de courts et longs auto-produits que le « Xavier Dolan français » a réalisé à l’aune de sa majorité, avant d’enfin signer une réalisation « officielle » à seulement 18 ans.


Loin de ses films de genre cracra, le cinéaste a depuis ses débuts dans la cour des grands, réalisé un virage mélodramatique, avec des thématiques plus sociales et intimes, qui trouvent un certain niveau de consécration sur Les Enfants Vont Bien.

La chronique d’une femme sans enfant retrouvant sa sœur après plusieurs années de séparation, qui lui laisse ses enfants avant de disparaître volontairement le lendemain.


Si certaines situations apparaissent ou interviennent de façon un peu trop facile, cela ne gène jamais le visionnage d’un film incroyablement émouvant, distillant tout du long, une atmosphère de spleen particulièrement intense.


Cela fait de Les Enfants Vont Bien un mélo qui ne dit pas son nom, ne tombant dans aucun piège du tire-larme qu’on a l’habitude de voir avec ce sous-genre duquel il est pourtant l’un des meilleur exemple récent.

Nathan Ambrosioni a atteint un niveau de maturité impressionnant en terme de mise en scène, laissant flotter sa caméra au plus près de ses personnages, et dérouler l’action lors de nombreux plans fixes ou séquences extrêmement forts ; sublimés par une lumière douce qui magnifie moins le long-métrage que la précision des cadres, disant parfois plus que ses dialogues.


Le cinéaste a dit ne pas vouloir juger ses personnages, et ce qui est sûr c’est qu’en plus de ça, il les aime d’amour et développe un attachement lancinant mais ravageur, qui sans jamais trop en faire, ancre une confiance en son spectateur, et de surcroît, des émotions très intenses. Sans être un fan inconditionnel de Camille Cottin, c’est aussi sans nul doute un de ses meilleur rôle, et le reste du casting n’est pas en reste, notamment les enfants, qui risquent de ne pas vous laisser de marbre.


Sortie le 3 Décembre.


Camille Cottin dans Les Enfants Vont Bien de Nathan Ambrosini

Camille Cottin dans Les Enfants Vont Bien de Nathan Ambrosini


IMAGO de Laurent Sénéchal ...Dernière séance


On passe maintenant au dernier jour avec l’unique séance à laquelle on a pu assister, l’avant-première d’Imago, documentaire sélectionné

(et récompensé) la dernière Semaine de la critique et monté par Laurent Sénéchal, a qui le festival a cette année accordé un focus et une carte blanche.

Un nom qui vous sera sûrement inconnu, mais qui reste plutôt solide, le monsieur ayant travaillé avec un couple de cinéastes plutôt reconnu, aka Arthur Harari et Justine Triet, sur quelques films discrets tels qu’Anatomie d’une Chute, ce qui lui aura valu entre autre un césar et une nomination aux oscars ; pas mal.


Le long-métrage, réalisé par Déni Oumar Pitsaev, suit le retour de ce dernier dans sa famille et sa Géorgie natale, où il a prévu d’y construite une maison plus ou moins atypique.

Derrière cette prémisse un peu quelconque, Imago est avant tout l’un des plus beau film récent traitant du retour au pays et de la famille, puisque derrière ce point de départ, le cinéaste développe par ses échanges, ses péripéties et son développement, un portrait très intime, évidemment marqué par la culture Tchétchène, mais nécessairement universelle.


La réalisation, non loin des films de Lifshitz, ne contient quasi aucun code du documentaire et est filmé comme une fiction, ce qui vient d’autant plus créer une immersion et un intérêt à rencontrer, écouter et voir se développer ces gens du quotidien qui traduisent dans leurs mots, un héritage historique tout de même conséquent. Malgré quelques longueurs, le film est d’une joliesse plastique et narrative assez rare dans le genre, fait d’une manière humble et pourtant très puissante, narré efficacement, et avec plusieurs échanges en pleine nature ou autour d’un repas, qui risquent parfois de sortir difficilement de votre mémoire.


Sortie le 22 Octobre.


Imago de Laurent Sénachal

Imago de Laurent Sénachal


PLACE AU PALMARES.....


Après cette ultime séance et une masterclass de Laurent Sénéchal aussi pertinente que passionnante, c’est malheureusement l’heure de tirer le rideau pour le FIFIB, duquel je n’aurai pas pu voir grand-chose du côté des courts-métrages et surtout de la sélection contrebande, qui reste un des must-have de ce festival.


Quelques heures après, le palmarès est tombé, et était étonnement dépouillé de plusieurs prix présents les années précédentes, comme ceux liés à Erasmus+, à la musique ou même au casting.

Néanmoins, deux distinctions auront été attribuées aux longs de la compétition, dont le grand prix repartit à Bouchra de Meriem Bennani et Orian Barki ; ainsi qu’une mention spéciale attribuée à Roqia.


Deux prix inattendus, mais bienheureux, car si ces films n’auront pas fait l’unanimité lors du festival, ils sont d’une singularité fascinante et présentent un art de la débrouille tout aussi passionnant, qui ont été soulignés par ces prix. D’autant que ces deux films ne bénéficient toujours pas de distributeur, et pourraient bien s’en voir trouver un dans le futur, comme avec Nome, ancien grand prix d’il y a 2 ans.


Pour ma part, voici non pas mon palmarès, mais les films qui m’auront durablement marqué cette année, en attendant la 15e édition, en octobre 2026 !


Un Monde fragile et merveilleux (qui s’impose d’ores et déjà comme le meilleur film de 2026)


Les Enfants vont bien (une des propositions les plus touchante du festival, avec une distribution exceptionnelle et la rencontre de Nathan Ambrosioni, adulte à l’âme d’enfant tout simplement incroyable)


Des Preuves d’Amour (parmi les plus gros fou rires du festival et une note d’espoir très appréciable)


Le Cri des gardes (Un film qui ne fait que monter dans mon estime, dont on se souviendra moins de sa radicalité que le dialogue après-séance avec Claire Denis : incroyable de bout en bout)


Les Immortelles (Coup de cœur qui aura emporté les spectateur du côté du rire et des larmes)


Bouchra (Proposition aussi casse-gueule que fascinante qui a bien mérité son grand prix)


Mektoub my love : canto due (Car on a attendu comme pas permis ce projet, et l’attente valais ô combien le coup)

Commentaires


Post: Blog2_Post

© 2024 / L U M I È R E

bottom of page